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jeudi 18 décembre 2014

Tournage dans les mines d'argile

Dans le cadre de la conception d'une série d'objets en céramique, je décide de suivre le circuit d'extraction de l'argile blanche très abondante dans la région. Plusieurs rencontres sont donc organisées avec les mineurs de la région d'Abgangnizou au sud-ouest d'Abomey. Je tourne environ trois heures de film sur leur travail harassant. Les conditions sont dures et le travail ingrat et risqué. Les images feront l'objet d'un montage au retour pour développer une petite vidéo sur ces gestes quotidien de plongée dans la terre et de transport d'argile.


En parallèle, j'essaye de comprendre les différentes formes construites par les potières, souvent liées à des cultes vaudou et répondant à des besoins très précis. Et je questionne les adeptes et initiés que nous rencontrons sur les Legba (objets de cultes incarnant des divinités sur lesquels sont pratiqués des sacrifices et rituels) qui sont souvent réalisés en argile rouge et intègrent différentes poteries sacrées...

Conception de porte-aiguilles

Tout le séjour à Abomey fait l'objet d'une collaboration avec un artisan de la famille Yémadji. Cette famille appelée par le roi afin de réaliser toutes ses décorations en tissu appliqué utilisées lors des cérémonies (pare-soleil, drapeaux, pagnes ou tissu illustrant les conquêtes du royaume), réside aux portes du palais et continue de génération en génération à utiliser cette technique au gré des commandes en s'adaptant aux demandes étrangères.
J'ai choisi de collaborer avec cette famille pour créer un lien avec l'entreprise Toiles de Mayenne et échanger autour d'un matériau similaire en croisant les techniques et les cultures.

En arrivant à Abomey la commande est passée auprès de François-Xavier Yémadji, qui semble être tout indiqué pour réaliser une commande particulière sortant des sentiers battus. Il s'agira de trente porte-aiguilles ornés chacun d'un motif unique issu des dessins et relevés réalisés auprès des pêcheurs, couturier(e)s et mécaniciens dans le cadre du projet Les mains invisibles. Les formes se croisent, superposant des contextes de travail, des architectures et des outils d'horizons différents.
















mardi 9 décembre 2014

Visite d'atelier, chez Edouard Vodoumbo

Edouard Vodoumbo est artiste, modeleur, peintre, sculpteur de statuettes en argile et en béton. Il est le prince héritier du roi Akaba et nous accueille régulièrement dans son atelier pour échanger, modeler ensemble, mener un entretien autour de son parcours et de son travail. Il a été un relais précieux dans des échanges, ici à Abomey, avec différents interlocuteurs : prêtre, artiste, artisan, chef des mines d'argiles, chef de quartier...
Il a été l'apprenti de Cyprien Tokoudagba, grand artiste béninois et a hérité de ses techniques, notamment dans la production de bas-reliefs.
Petit tout en images de son palais, de son atelier et du quartier à la découverte de temples vodun où apparaissent nombre de ses productions...








Tohossou, divinité de l'eau





Statue d'homme debout dont la tête et le torse évoquent un requin. Symbole de Béhanzin, dernier roi d'Abomey


Quelques essais de Julien en argile, à partir de pièces de moteur, en attente de cuire dans le four artisanal chez Edouard


Edouard devant le palais de Tohossou sur lequel apparaissent ses peintures









samedi 6 décembre 2014

UNIK, lieu de création contemporaine

Du Lieu Unique à Nantes à Unik-lieu de création contemporaine à Abomey, il n'y a qu'un pas...






Oeuvre de Dominique Zinkpè, en cours de montage

Unik-lieu de création contemporaine, géré par l’association AYÏZO, a été imaginé comme plateforme favorisant l’impulsion et les dynamiques de développement des expressions contemporaines et visuelles au Bénin. Il a été inauguré en juin 2012 et son directeur artistique est Dominique Zinkpè. UNIK est situé dans le quartier Dokpa-Toyizanli, dans l'arrondissement de Sèhoun et s'étend sur près de 10 000m2. Il comprend neuf ateliers de création, un accueil en résidence, des espaces d'exposition et un espace scénique. On y découvre le travail d'artistes béninois tels Aston, Bamouss, Sébastien Boko, Marius Dansou, Benjamin Déguénon, Thierry Oussou, Prince Toff, Damien Tokoudagba, Totché... 

A Unik, Julien poursuit son travail de recherche de nouvelles formes suite aux relevés faits dans les ateliers de mécanique. Margaux amorce un travail de recherche autour des corrélations possibles entre le culte vodun et le champ de la performance en art. Aux quatre coins d'Abomey, elle se déplace des couvents aux palais, d'ateliers d'artistes à l'office de tourisme glanant la parole des détenteurs de cette riche histoire...






lundi 1 décembre 2014

Arolondo, l'artiste du "rien n'est gâté"


Arolondo est artiste plasticien, créateur des œuvres de don de l'esprit comme il me l'indique lors d'un entretien mené avec lui. Du rap à l'artisanat, de la récupération à la performance, Arolondo est un artiste né dans la rue. Il crée à partir de cet espace et des éléments qui l'occupent. Collectionneur de sacs plastiques pure water, glâneur d'objets rouillés, de plastiques brûlés, de canettes écrasées, il puise son inspiration dans tout ce qui est gâté, partout où se trouvent les déchets, dans les espaces désorganisés. Il aime donner de l'ordre et faire revivre les éléments voués à l'oubli.


Arolondo et son amie Soniart








"L'Afrique est rempli de poubelles, tout ce qu'on touche on le jette. Pensons à transformer les objets, à leur redonner une seconde vie comme j'essaie aussi de donner espoir aux enfants des rues de survivre encore longtemps. Par exemple, un objet pointu dans la rue peut faire crever une moto, qui peut faire tomber quelqu'un qui allait dans un programme pour un moment précis. Et voilà, simple crevaison, ça peut déjà causer un retard et lui faire rater son programme. Hors, cet objet qui traîne par terre pour causer ce dégât, quand je le trouve en allant dans mon programme, pouf ! je le prends, je le mets dans un autre sac donc toujours "Arolondo, sac au dos". On m'appelle Arolondo, sac au dos parce que chaque fois que je m'en vais, je garde toujours un sac pour sauver les objets qui m'intéressent dans la rue partout où je passe. Le concept est le "noun démambglé" : le rien n'est gâté. Si vous remarquez autour de moi, les canettes, les habits usés, les chaussures, les sacs gâtés, rien n'est gâté (...) histoire de rendre un peu propre notre environnement. Par exemple, à Cotonou, tu ne fais pas 5 mètres sans trouver un sachet d'eau pure water par terre ; ça joue un grand désordre dans le domaine du bio-dégradable. Une fois le sachet par terre, ça peut faire 300 ans sans être pourri, ça empêche l'eau d'aller en profondeur pour la terre, ça empêche aussi les potagers et les plantes de pousser. Le concept du "noun démambglé", c'est mon histoire même car mes parents se disaient que j'étais un enfant gâté parce qu'une fois l'école abandonnée, j'ai commencé ma vie dans la rue, avec le hip hop, mon papa disait "après tout l'argent investi dans l'école jusqu'à maintenant, tu es devenu n'importe quoi, tu remplis ma maison de poubelles, je ne comprends rien, tout est gâté, mon argent est gâté, c'est foutu." Donc pour lui montrer que rien n'est gâté, j'insiste beaucoup sur les récup', la récup' est plus chère pour moi que tout dans ma vie parce que ça porte une partie de mon histoire. Personne ne croyait à ma réussite mais aujourd'hui, c'est moi Arolondo partout dans les rues. J'ai commencé par adopter ma politique d'installer mes œuvres à la portée des gens, de la population qui deviennent des repères dans le quartier."

Extrait de l'entretien mené avec Arolondo, novembre 2014.


Arolondo est le prince héritier du roi Kpengla (règne de 1774 à 1789).


Voici son palais qui abrite les œuvres présentées ci-dessus.


L'emblème du roi Kpengla est un oiseau et un fusil. L'oiseau tient une pierre dans son bec. Sa devise est : "Dans l'eau, la pierre ne sent ni ne craint la fraîcheur."
Le jour de ma visite, l'entrée du palais sert d'espace de recensement pour les prochaines élections ce qui explique les dizaines de listes collées au mur sur lesquelles on peut apercevoir quelques visages d'habitants du quartier !